Manon, ou l'inoubliable rencontre

Aquarelle de Chantal Skoty         stylo de Daniel Lejumeau

C’est elle, que j’observais…
Un passant la regarda avec curiosité.
Il dit à sa compagne : « Regrettable qu'elle soit noire, elle est belle ! »
Pardon Monsieur : « Elle est tout simplement belle parce qu’elle est noire ! »

Un face à face inoubliable…
C’est silencieux un regard, c’est une onde entre deux êtres.
Avant de pouvoir se connaître, il faut être reconnu
C’est ce qui nous donne le sentiment d’existence.
Je m’en souviens, de ses larmes sur les joues,
Des roses et du soleil, du banc de nos paroles
Devant l’étang et les nymphéas blancs au cœur jaune.
C’était à Giverny au Jardin de Monet
Là, où les écharpes de brume s’accrochent aux peupliers.
Cinq lettres, cinq grains de poésie, prénom Manon
L’ange gardien des mots secrets puisés à la source de ses yeux
Elle était vêtue, pauvrement, proprement
Des bas de coton gris, des souliers fatigués
Et sur ses épaules, la capote bleue de l’assistance publique
Sur le visage, un sourire un peu triste,
Comme si les fleurs qu’elle tenait à la main
Eussent été des fleurs de chagrin.
La chevelure, noir corbeau coiffée en deux larges bandeaux
Venait s’emprisonner sur le cou dans un énorme chignon.
Ce qui frappait d’abord c’étaient le teint et le regard
Des yeux bleu violet dans deux grands cernes.
On n’aurait pu dire si elle était jolie ou non
Elle était merveilleuse, adorable, troublante
Le type de femme dont l’on tombe amoureux…
Je m’en souviens, de mes larmes sur ses joues
Quand j’ai posé mes doigts sur ses lèvres
Avec Manon j’épousais la nuit !

 

Béam effectivement le regard que l'on porte... Ce texte est dédié à Manon de Giverny mais aussi à toutes les Manon que des peintres immortalisent.

Aux Manon, le noir leur va si bien

 Ce texte a été offert au club de peinture du village voisin pour une série de portraits 

Peindre les pensées de l'autre quelle aventure