merci à vous tous !
La sueur des cargos
Préambule
« La poésie ne se vend pas, elle ne s’est jamais vendue, elle ne se vendra jamais. Elle ne se lit pas. Elle n’est lue que par quelques maniaques ou par des universitaires qui la plupart du temps la lisent mal… »
Léo Ferré.
Alors il n’y a aucune illusion à se faire, ces lignes comme celles qui suivent resteront confidentielles ou tout au plus seront lues par seulement quelques amis ou par quelques uns des maniaques dont parlait Ferré.
Ces poèmes avec les idées et les images, les pans de ciel bleus et ceux plus sombres des nuits d’orage, ces quelques morceaux de moi (morceaux d’âme à défaut d’une meilleure appellation) qu’ils essaient de transporter, demeureront de simples dépôts d’encre noire sur du papier blanc ; un peu comme ces particules quantiques qui n’auraient de réalité tangible que si elles sont observées… J’aime bien cette idée qui fait que les mots alignés dans un livre demeurent des ondes incertaines tant que le livre est fermé et ne prennent sens et consistance que lorsqu’un œil intéressé et attentif se porte sur eux. Dans cette optique, mes textes demeureront souvent, je le crains, dans cet état d’incertitude quantique ; je n’écris pas des poèmes mais des ondes poétiques !
Lire de la Poésie c’est « intello » ou pédant, mais en écrire c’est presque perçue comme ridicule par la majorité des gens ; avec en corolaire une gène qui va de l’indifférence au mépris…
Alors si la poésie ne se vend pas, ne se lit pas et n’est pas source de reconnaissance, pourquoi écrire ?
Je connais quelques personnes qui écrivent avec délectation, qui alignent des vers avec une facilité déconcertante (ou du moins qui me semble l’être) et qui se font un plaisir de tourner leurs mots, leurs phrases, leurs rîmes pour en faire sortir un sonnet français, marotique, élisabéthain ou que sais-je encore, en respectant à la lettre les règles prosodiques édictées par les Malherbe du XVII° siècle. J’admire sincèrement leur maîtrise et leur capacité comme le disait Boileau, à «réduire la Muse aux règles du devoir» ; j’apprécie la beauté de leurs vers et la perfection prosodique de leurs créations. Pourtant je ne peux pas écrire comme cela ! Non pas que j’en sois formellement incapable puisque j’en connais les règles et que tout après n’est question que de technique et de travail…
Mais écrire n’est pas pour moi un plaisir en soi, mais au contraire une forme de souffrance nécessaire, une sorte de démarche cathartique ; et si plaisir il y a c’est celui de la douleur salvatrice et au final agréable que l’on ressent en massant un muscle contracté et douloureux…
Je refuse donc toute obligation contraignante sur la forme (parlons, si on veut, de poésie libre) et si un certain nombre de mes textes s’orientent vers des formes d’inspiration néo-classiques, ce n’est qu’un des effets paradoxal de cette liberté !
Si ces traces d’encre ont quitté leur état ondulatoire pour devenir l’espace d’un instant des particules, des mots, des phrases, c’est qu’un lecteur les parcourt ! A celui-ci je souhaite d’agréables moments…
Christian Gastou